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Tragédie de Nador: le Maroc informe des ambassadeurs africains à Rabat, vidéos à l'appui

Réunion d'information au siège du ministère des Affaires étrangères en présence des cadres du MAE et du ministère de l'Intérieur. Selon des ambassadeurs présents, les vidéos projetées par la partie marocaine, "d'une violence inouïe", montrent ce qui s'est réellement passé et "démentent ce qui circule sur les réseaux sociaux".

Tragédie de Nador: le Maroc informe des ambassadeurs africains à Rabat, vidéos à l'appui

Le 26 juin 2022 à 20h10

Modifié 29 juin 2022 à 13h15

Réunion d'information au siège du ministère des Affaires étrangères en présence des cadres du MAE et du ministère de l'Intérieur. Selon des ambassadeurs présents, les vidéos projetées par la partie marocaine, "d'une violence inouïe", montrent ce qui s'est réellement passé et "démentent ce qui circule sur les réseaux sociaux".

Ce dimanche en fin d'après midi, première réaction publique de Rabat après la tragédie de Nador qui a fait plus de 20 morts et des dizaines de blessés. Au ministère des AE, plusieurs cadres du ministère des Affaires étrangères et du ministère de l'Intérieur ont tenu une réunion d'information avec plusieurs ambassadeurs africains. Nous ne savons pas à ce stade s'il s'agit des pays subsahariens ou de tous les pays africains. Ni le nombre d'ambassadeurs présents. Les photos montrent toutefois une salle pleine.

Au cours de cette réunion, la partie marocaine a expliqué le déroulement des faits et a projeté des enregistrements vidéos des événements.

Jusqu'à cette prise de parole officielle marocaine, les vidéos montrant les corps gisant par terre et entassés, entre blessés et morts, suggéraient une responsabilité marocaine à un degré qui restait à définir. Lorsqu'on voyait ces images insoutenables avec des corps entourés d'éléments de la force publique armés de matraques, une relation mécanique se faisait entre les corps et les matraques.

"On nous a montré des vidéos d'une violence inouïe", a déclaré Mohammadou Youssifou, ambassadeur du Cameroun et doyen du groupe africain, à l'issue de cette réunion d'information. "Du jamais vu", ajoute-t-il. Le mode opératoire des migrants a changé: "au lieu d'attaquer la clôture, ils ont attaqué le point de passage, un passage étroit, où l'on passe un par un, équipé de tourniquets, d'acier. Ils étaient armés de gourdins, de bâtons, de couteaux, d'armes blanches. L'étroitesse du couloir du point de passage a provoqué une bousculade et des morts". Cette déclaration conforte en réalité le premier communiqué marocain qui parlait de bousculade et de chutes ayant provoqué les blessures et les morts.

Mohamed Abd Rassoul Mohamed Al Amine, ambassadeur du Tchad, ajoute à la sortie de la réunion (vidéos ci-dessous): les images sur les réseaux sociaux donnent l'impression d'une responsabilité marocaine, "mais ce n'est pas la réalité."

"Nous comprenons mieux ce qui s'est passé et nous allons informer nos autorités", ajoute l'ambassadeur du Gabon, Minko Mi-Nseme Sylver Aboubacar.

Les ambassadeurs ont également rendu hommage à la politique migratoire du Maroc et salué le rôle du Roi, champion africain en matière de migration. Le soutien au Maroc a été exprimé par différentes formules ainsi que la volonté de sensibiliser les migrants et d'accompagner le Maroc pour trouver des solutions pérennes. Des réseaux criminels et mafieux ont été également mis en cause. Les 4 ambassadeurs qui se sont exprimés se sont déclarés chacun à sa manière et avec ses mots, solidaires du Maroc. Des ambassadeurs ont enfin déclaré ne pas savoir à ce stade si des ressortissants de leurs pays font partie des victimes car les autorités marocaines n'ont pas encore communiqué de liste.

Ci-dessous, Mohamed Abd Rassoul Mohamed Al Amine, ambassadeur du Tchad

Ci-dessous, Mohammadou Youssifou, ambassadeur du Cameroun et doyen du groupe africain

Ci-dessous, Bachir Ibrahim Salah Huseeini, ambassadeur du Nigéria

Ci-dessous, l'ambassadeur du Gabon, Minko Mi-Nseme Sylver Aboubacar

Une tragédie qui pose de nombreux défis au Maroc et à la région

Les violents affrontements entre des migrants partis à l'assaut de la clôture entourant Melillia et les forces publiques marocaines et qui se sont déroulés vendredi 24 juin 2022, en début de matinée, se sont conclus par un dénouement tragique, avec 23 morts parmi les migrants et 140 blessés au sein des forces de l'ordre. Ce bilan est provisoire, il date de samedi soir 25 juin.

Même en recollant les bribes d'informations en provenance des autorités locales de Nador, de l'AMDH, de témoins oculaires, de la Ville de Melillia et des médias espagnols, on n'arrive pas pour le moment à reconstituer les faits avec certitude. Tout ce que l'on sait, c'est que des cadres des Affaires étrangères et du ministère de l'Intérieur ont projeté des vidéos devant des ambassadeurs africains, confortant et étayant l'explication de la bousculade qui a provoqué les morts et les blessés, tout en illustrant la violence des affrontements.

Depuis plusieurs semaines, des ONG signalent des tensions entre les deux parties, migrants et forces publiques. Selon ces sources, les autorités marocaines ont éloigné au moins des dizaines de migrants de la région de Nador, vers le centre ou le sud du Maroc. Depuis une semaine, elles étaient selon la même source, sur le qui-vive, ayant eu vent de la préparation d'un assaut de grande envergure.

Les migrants sont plusieurs milliers dans la forêt du mont Gourougou près de Nador et Melillia. Leur nombre exact n'est pas connu mais on sait que certains d'entre eux sont là-bas depuis au moins 2 ou 3 ans, voire davantage, les yeux rivés vers l'Europe.

Des ONG signalent l'arrivée ces deux dernières années, plus dense que par le passé, de ressortissants soudanais et tchadiens, qui prennent la route de Nador. Celle-ci est la plus proche pour cette nouvelle route migratoire qui emprunte le désert saharien vers la Libye, l'Algérie puis le Maroc. Pour une raison qu'on ignore, cette route est devenue plus attractive que la Libye. Sur les vidéos relatives aux événements tragiques de vendredi, on entend clairement des migrants s'exprimer en arabe.

Les différentes images tournées vendredi matin, montrent des centaines d'individus armés de pierres, de bâtons et de couteaux, tous jeunes et de sexe masculin, traverser les derniers quartiers de Nador et se rendant vers la clôture. Selon les sources espagnoles, 2.000 migrants se sont regroupés et ont convergé non pas vers la clôture, mais vers le sas de passage. 1.500 sont arrivés à proximité immédiate. 133 ont pu passer et atteindre le centre de réfugiés à Melillia.

D'autres images, vidéos et photos, côté marocain montrent quelques dizaines de corps gisant par terre et entourés d'éléments de la force publique matraque à la main. On ne sait pas d'où viennent ces corps, ni combien étaient morts, combien blessés et combien indemnes.  Le premier communiqué diffusé par les autorités locales de Nador, vendredi après-midi, a incriminé des chutes et des bousculades. La configuration des lieux où ces vidéos ont été filmées conforte cette thèse.

Ces images étaient néanmoins insoutenables car elles ne respectent pas la dignité de ces personnes. Et d'autre part, on n'a vu les ambulances que sur une seule (à notre connaissance) photo. Elles ont laissé croire, en outre, et pendant 48 heures, à une responsabilité marocaine dans le drame alors que les autorités locales indiquent que les décès ont été provoqués par une bousculade et des chutes du haut de la clôture.

Notons que l'AMDH et d'autres ONG ont souligné le comportement violent d'une partie des migrants tout en appelant la force publique à respecter les droits et la dignité de ces derniers et à ne pas intervenir d'une manière disproportionnée.

En attendant que les faits soient reconstitués et que les responsabilités soient mieux évaluées, cette tragédie sans précédent sur le sol marocain jette une lumière crue sur le drame que vivent les migrants qui errent d'un pays à l'autre, parcourant parfois des centaines ou des milliers de kilomètres à pied, avec une obsession unique: fouler le sol européen.

Entre leurs conditions miséreuses, et l'absence d'horizon ainsi que la déshumanisation qu'ils subissent au quotidien dans tous les pays de transit, le risque de mourir devient-il dérisoire pour eux? Cette violence est en effet un élément nouveau dans le phénomène migratoire.

Jusqu'à présent, le Maroc a eu une politique migratoire reconnue. Peut-il accepter la constitution de communautés étrangères retranchées dans une forêt, dont la présence est juridiquement illicite, qui tombe comme ces derniers jours, dans la violence? Et doit-il expulser une partie de ces migrants tout en régularisant une partie? Et s'il le fait, jusqu'à quand va-t-il réaliser des opérations de régularisation? Quelle que soit l'option choisie, comment ignorer la détresse de ces pauvres hères, déracinés, loin de leurs foyers, vulnérables? C'est une partie de l'humanité qui est là, chez nous, à nos portes. Ce dimanche, les ambassadeurs qui ont pris la parole se sont déclarés solidaires du Maroc.

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