Algérie-Maroc : “Au pire, une guerre par procuration” (experts)

Après la dernière escalade de l’Algérie contre le Maroc, qu'elle accuse de la mort de trois routiers algériens, l’ONU craint un conflit direct entre les deux pays. Un scénario très improbable pour deux analystes qui penchent plutôt pour l'hypothèse d'une aide militaire croissante de l'Algérie au polisario.

Algérie-Maroc : “Au pire, une guerre par procuration” (experts)

Le 8 novembre 2021 à 16h51

Modifié 9 novembre 2021 à 8h06

Après la dernière escalade de l’Algérie contre le Maroc, qu'elle accuse de la mort de trois routiers algériens, l’ONU craint un conflit direct entre les deux pays. Un scénario très improbable pour deux analystes qui penchent plutôt pour l'hypothèse d'une aide militaire croissante de l'Algérie au polisario.

Évoqué indirectement par le président Abdelmajid Tebboune, pour qui cette mort imputée au Maroc "ne restera pas impunie", le risque d’une attaque surprise du voisin de l’Ouest contre le Maroc est depuis quelques jours sur toutes les lèvres, mais il convient de tempérer cette éventualité.

"Une éventualité à exclure"

Si ce scénario a été considérée comme improbable dans des déclarations à Médias24 de plusieurs spécialistes de la région, comme le Français Pascal Boniface ou l’ex-membre du polisario Mustafa Salma, un expert marocain qui a requis l’anonymat nous a affirmé que le véritable objectif de l’Algérie était d’avoir un prétexte pour renforcer son soutien aux milices du polisario avec des livraisons d’armes de guerre.

Plus volubile, l’expert militaire Abdelhamid Harifi, qui a aussi exclu une attaque directe contre le Maroc, nous a révélé que plusieurs indices récents penchaient en faveur d’une entrée en guerre indirecte de l’Algérie via le polisario.

"En effet, à moins d’être totalement inconscient, aucun pays de la planète ne peut déclarer une guerre sans s’y être longuement préparé. Et jusqu’à aujourd’hui, l’Algérie n’a mobilisé aucune troupe aux frontières communes et encore moins transféré par voie routière un important matériel de guerre, comme des blindés notamment.

"Un prétexte commode pour justifier des fournitures d’armes"

En réalité, le pouvoir algérien cherche à trouver un semblant de justificatif pour légaliser des aides militaires qu’il veut commencer à fournir aux milices du polisario. Et créer ainsi une atmosphère d’insécurité dans la région pour faire pression sur le Conseil de sécurité. L’Algérie ne veut clairement pas la poursuite du processus politique onusien.

"L’Algérie veut reprendre le rôle de la Libye"

"En effet, juste avant l’incident, les observateurs ont pu constater que des éléments du polisario étaient en train de s’entraîner à l’utilisation de missiles russes anti-blindés fournis par l’armée algérienne.

"Ce rôle de fournisseur d’armes appartenait à feu M. Kadhafi, ou plus exactement à l’ex-URSS, véritable armurier du front via la Libye, qui offrait aux miliciens des missiles, des blindés T54 et T55, des véhicules de transport de troupes, des systèmes de défense antiaérien, des orgues de Staline...

"Jusqu’à l’arrivée du président Tebboune, l’Algérie avait un rôle de financier, d’hébergeur et enfin de fournisseur d’outils de transports (camions, Jeeps, etc.), mais absolument pas d’armements lourds.

"Le polisario s’entraîne au maniement de missiles russes offerts par l’Algérie"

Si en quarante-six ans de conflit, il n’y a jamais eu de preuves formelles sur des fournitures algériennes d’armes, il y a eu un exercice filmé où l’on voit des miliciens s’entraîner au maniement de missiles antichars Kornet.

Du matériel d’origine russe qui n’a pu être livré que par l’Algérie, ou alors par l’Iran, sachant que le polisario n’a jamais disposé de ce type d’armes avant la signature du cessez-le-feu en septembre 1991.

"La participation de soldats algériens aux côtés des miliciens sonnerait comme une déclaration de guerre contre le Maroc"

Sur une éventuelle implication directe des soldats de l’Armée nationale populaire (ANP) aux côtés des miliciens du polisario, l’expert juge impossible un tel soutien sans l’aval d’une puissance mondiale.

A moins d’être totalement inconsciente, la junte algérienne qui contrôle le pouvoir ne pourra jamais envoyer ses propres militaires car cela équivaudrait à une déclaration de guerre contre le Royaume.

Rappelons en effet qu’après avoir fait prisonniers 120 Algériens aux côtés des captifs du polisario lors de la bataille d’Amgala en 1978, feu le roi Hassan II avait menacé l’Algérie de frappes directes sur son territoire si elle continuait à envoyer ses soldats combattre avec les séparatistes.

Un discours historique qui avait d’ailleurs mis fin à l’intervention directe des militaires algériens de l’ANP.

"Le 13 novembre 2021, un premier anniversaire à risque"

Sur la forme que pourrait prendre la réponse promise par le président algérien, Harifi n’exclut pas un incident qui serait provoqué par le polisario lors de la journée du 13 novembre prochain pour commémorer le premier anniversaire de la sécurisation de Guerguerat.

Un scénario probable car l’Algérie a fait des pieds et des mains mais en vain, pour obtenir un communiqué d’une chancellerie occidentale appelant à une enquête internationale sur l’incident de Bir Lahlou.

De son côté, le Maroc n’y a fait aucune référence et le discours royal a d’ailleurs superbement ignoré les accusations algériennes et le jeu d’escalade initié par un pouvoir militaire qui multiplie les gesticulations.

"La ceinture de défense a complètement annihilé les tentatives d’attaque du polisario, mais également celles éventuelles de l’Algérie"

En réalité, même si ses hommes voulaient assister directement le harcèlement des milices du polisario, l’Algérie ne pourrait pas faire grand-chose car le mur de sécurité achevé en 1987 a totalement changé la donne, en érigeant un rempart extraordinaire contre toute éventuelle attaque extérieure.

Le pire qu’il puisse arriver avec une aide militaire algérienne, c’est la poursuite d’escarmouches et une guerre d’usure pour alimenter la propagande du front dans ses camps de réfugiés et à l’international.

En manque d’effectifs, le polisario, passé depuis les années 70-80 de 20.000 à 7.000 miliciens, est incapable de contrôler un territoire aussi vaste que le Sahara marocain, sans compter le mur qui est infranchissable.

« Des fournitures algériennes d’armes russes auront pour effet de provoquer une grave crise diplomatique avec la Russie »

Hormis des missiles antichars, antiaériens et des systèmes de brouillage des drones marocains, l’Algérie ne peut pas lui fournir d’armes lourdes car s’il est prouvé que le polisario attaque des positions marocaines avec du matériel russe, cela donnera lieu à une grande crise diplomatique entre les deux pays.

"Sachant que l’époque où Kadhafi offrait du matériel russe avec l’aval de l’URSS dans un contexte de guerre froide est terminée, la Russie, qui n’a pas opposé son droit de véto lors de l’adoption de la résolution 2602, n’a en effet aucun intérêt à se mettre à dos le Maroc."

Par conséquent, la Russie ne risque pas d’autoriser son client algérien à céder au polisario une partie de ses armes, sous peine de se priver de plusieurs marchés conclus avec le Maroc (halieutique, gazier…).

"Sans l’aval d’une puissance mondiale comme la Russie, la perspective d’une guerre contre le Royaume s’éloigne donc de jour en jour", conclut Harifi, qui se dit persuadé du fait que personne ne laissera éclater un conflit qui pourrait, en plus, dérégler l’approvisionnement d’une partie de l’Europe en gaz et en pétrole…

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