Errachidia: Arrêt des travaux de creusement de puits entre Goulmima et Tadighoust, la population soulagée

Les travaux de creusement de puits et de bassins de stockage d’eau, entre les oasis de Tadighoust et Goulmima, ont été arrêtés, pour le plus grand bonheur des habitants de la région. Explications.

Errachidia: Arrêt des travaux de creusement de puits entre Goulmima et Tadighoust, la population soulagée

Le 11 mai 2021 à 20h40

Modifié 11 mai 2021 à 21h50

Les travaux de creusement de puits et de bassins de stockage d’eau, entre les oasis de Tadighoust et Goulmima, ont été arrêtés, pour le plus grand bonheur des habitants de la région. Explications.

Dans un document publié le 10 mai (fac-similé ci-dessous), la société Wahat Ziz annonce l’arrêt immédiat des travaux de creusement de puits et de bassins de stockage d'eau dans la région de Goulmima, « suite aux nombreuses réclamations de la population ».

« Je ne peux pas nuire à toute une population »

Wahat Ziz est la société qui réalisait ces travaux. Elle est gérée notamment par Addi Khezou (directeur général), député du RNI dans la circonscription de Tinghir.

Joint par nos soins, ce dernier nous assure d'abord qu'il s'agit d'un projet entrepris uniquement par la société qu'il gère, et non d'un projet en collaboration avec d'autres parlementaires, comme indiqué par différents médias.

Il nous explique ensuite avoir arrêté les travaux par lui-même. "Il n’y a pas eu de négociations avec les autorités locales. Ma décision intervient après les nombreuses réclamations de la population, que je me dois de respecter en tant que parlementaire dans la région".

Sur le document annonçant l’arrêt des travaux, signé par M. Khezou, ce dernier explique que le choix d’investissement entre les oasis de Tadighoust et Goulmima a pour but de développer l’économie dans la région, et de créer des emplois.

Il assure que toutes les démarches administratives ont été respectées, et indique qu’aucune des parties concernées par ledit projet n’a exprimé des craintes quant à son impact sur la population de la région.

"Nous avons obtenu toutes les autorisations nécessaires pour le creusement des puits auprès de l’Agence du bassin hydraulique de Guir Ziz Ghriss (ABHGZG), dans le total respect des lois et des procédures administratives en vigueur", ajoute le document.

Toutefois, les habitants de la région ont été nombreux à dénoncer ce projet, qui risque d’assécher les ressources en aval, à partir desquelles sont arrosées les palmeraies. "Par respect à l'égard de la population, j’ai décidé d’arrêter, par moi-même, les travaux", martèle-t-il.

Au téléphone, il nous confie ce qui suit : "je ne me vois pas porter atteinte à 50.000 ou à 60.000 personnes. Je suis natif de la région et je suis parlementaire. Je suis censé défendre les intérêts de ces gens".

Et d'ajouter: "pour mener ce projet, j’ai suivi toutes les étapes administratives nécessaires. J’ai signé un contrat de location avec le ministère de l’Intérieur, et j’ai payé mon loyer et ma caution."

10 puits autorisés par l'Agence du bassin hydraulique GZG

"Avant le démarrage des travaux, j’ai demandé l’aval de l’Agence du bassin hydraulique de Guir Ziz Ghriss, qui m’a autorisé le creusement de 10 puits".

M. Khezou projetait de planter des palmiers dattiers sur 900 ha, pour la production d'El Majhoul (50%) et Boufekkous (50%). Pour ce faire "et voir si le projet pouvait marcher, nous devions d’abord réaliser des travaux de sondage pour analyser l’eau et la terre. Des travaux que nous ne pouvions pas mener avant de louer le terrain et d’avoir l’autorisation de l’ABH-GZG. Une fois que nous avons démarré lesdits travaux de sondage, les habitants se sont soulevés contre le projet".

"Lorsque l’affaire a pris de l’ampleur, j’ai décidé par moi-même d’arrêter les travaux. J’ai ainsi adressé, le 13 avril 2021, un courrier au Wali de la région de Draâ-Tafilalet pour l’informer des craintes de la population. Un autre courrier a été adressé, le 26 avril 2021, au ministère de l’Intérieur pour annuler le projet, et résilier le contrat de location".

"Je me réserve toutefois le droit de récupérer la caution, les frais de location et tous autres frais engagés, dans le cadre des lois en vigueur", a-t-il précisé sur le document.

Un investissement de 35 MDH

D’un autre côté, il regrette qu'un projet d'une telle ampleur n'ait pas pu aboutir. "Si on n’investit pas dans notre région, qui le fera? Si les investisseurs natifs de la région sont confrontés au refus de la population locale, comment peut-on alors attirer des investisseurs des grandes villes, telles que Casablanca ou encore des investisseurs étrangers?"

M. Khezou ajoute que "selon le business-plan établi par sa société, ce projet aurait nécessité un investissement de 35 millions de DH, et aurait généré entre 50 et 100 emplois".

"Certes les investisseurs doivent prendre en compte les problèmes de la population, mais celle-ci ne doit pas non plus bloquer tous les projets, sinon, la région risque de ne pas se développer, et le taux de chômage y restera élevé".

Soulagement de la population

Sur les réseaux sociaux, les habitants de la région expriment leur joie et leur soulagement quant à cette décision.

Tel est le cas de Moha Oustouh, ingénieur agronome natif de la région, qui rappelle à Médias 24 "les dangers d’un tel projet sur les ressources hydriques".

"Les réserves annuelles de la nappe de Goulmima-Tadighoust sont estimées aux alentours de 5 millions de M3. Ce sont donc des réserves limitées, qui se trouvent entre 50 à 100 m de profondeur. Les eaux de sources de Tifounassine, coulent quant à elles à une profondeur de 150 m".

"Cet investisseur va commencer par faire des forages pour pomper l’eau. Lorsque les 5 millions de m3 seront épuisés, il creusera plus en profondeur pour trouver de l’eau. A 150 m, il se retrouvera à pomper les eaux de sources de Tifounassine", qui seront à leur tour épuisées.

"Sur le plan agronomique, les cultures intensives de palmiers nécessitent beaucoup d’eau. A titre d'exemple, planter 1.000 ha de palmiers nécessitent entre 15 et 20 millions de m3 d’eau par an.  Cet investisseur envisageait d'en planter sur 900 ha".

Par ailleurs, "la capacité du barrage qui devrait être construit en 2024 est estimé à 100 millions de m3 d'eau par an. Ainsi, un projet de palmiers dattiers sur 1.000 ha prélèvera, à lui seul, 1/5 de la capacité du barrage", ce qui est inconcevable.

Mutisme de l'Agence du bassin hydraulique

La population de la région pointe du doigt l’Agence du bassin hydraulique, chargée de la gestion et de la surveillance des ressources hydriques, qui "aurait dû s’apercevoir de cette problématique avant qu’elle ne soit signalée par les habitants".

Selon un document (fac-similé ci-dessous) qui circule sur les réseaux sociaux depuis l'éclatement de cette affaire, ladite Agence a notifié en 2017 au Wali de Draâ-Tafilalet et au gouverneur d'Errachidia que "les études hydrologiques, hydrogéologiques, et géophysiques ont montré que l'eau souterraine est limitée, notamment à Goulmima. De ce fait, on ne peut pas compter dessus pour davantage de projets agricoles dans la région".

Dans un article précédent, l'Agence nous avait expliqué que toute autorisation délivrée pour le creusement de puits et l'exploitation des ressources hydriques est précédée par des études approfondies.

Malgré nos nombreuses tentatives de le contacter, ce mardi 11 mai, pour authentifier le document en question et avoir sa version des faits, le directeur de l’Agence est resté in joignable.

Document publié le 10 mai par la société Wahat Ziz

Courrier envoyé par l'Agence du bassin hydraulique de Guir Ziz Ghriss en 2017, au Wali de Draâ-Tafilalet et au gouverneur d'Errachidia

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