“Le regard sur la vie change après la guérison de la Covid” (témoignages)

Cinq personnes atteintes de la Covid-19 qui en sont aujourd’hui guéries, témoignent de leur vie post-Covid. Elles racontent la manière dont la maladie a changé leur regard sur certaines choses du quotidien, auxquelles elles ne prêtaient pas particulièrement attention auparavant et, surtout, sur la vie en général.

“Le regard sur la vie change après la guérison de la Covid” (témoignages)

Le 14 avril 2021 à 13h06

Modifié 14 avril 2021 à 14h44

Cinq personnes atteintes de la Covid-19 qui en sont aujourd’hui guéries, témoignent de leur vie post-Covid. Elles racontent la manière dont la maladie a changé leur regard sur certaines choses du quotidien, auxquelles elles ne prêtaient pas particulièrement attention auparavant et, surtout, sur la vie en général.

Toutes disent que la contamination à la Covid-19, et les séquelles qui ont parfois marqué la période post-guérison, a eu l’effet d’une perception "avant/après" sur leur vie, le monde en général, mais aussi sur elles-mêmes. Elles disent désormais savourer des petits plaisirs anodins de la vie quotidienne et avoir initié des activités auxquelles elles consacraient peu, voire pas de temps, auparavant.

Hakim*, 68 ans, atteint de la Covid-19 en mars 2020. Le fait d’avoir été contaminé a changé la façon dont je vois la vie globalement, d’autant que je l’ai vécu de façon assez poussée : j’ai été parmi les premières personnes contaminées, en mars 2020, et je suis resté hospitalisé pendant 40 jours. J’ai compris qu’on se préoccupait trop de choses qui, à bien y réfléchir, n’ont pas beaucoup d’importance, et qu’on délaisse au contraire des choses simples qui sont, pourtant, le fondement de notre bonheur : la joie que nous procurent les autres et qu’on leur procure, les moments passés en famille et entre amis… Tous ces bonheurs gratuits que le bon Dieu nous a donné… Or, la plupart du temps, on oublie tout cela et on s’accroche à des choses qui n’ont pas beaucoup d’importance et qui peuvent partir du jour au lendemain. C’est une vision des choses que je partageais avant d’avoir la Covid-19, mais disons que cela a renforcé cette perception. La vie est finalement assez fragile ; on peut partir à n’importe quel moment et cela ne dépend pas toujours de nous. J’essaie d’oublier que nous vivons avec un virus : je fais attention, certes, mais je ne m’empêche pas de vivre. Si je dois vivre encore une année, autant la vivre sans penser à ce virus et à toutes les complications qu’il suscite. C’est une leçon que je retiens. La peur du virus me semble plus grave que le virus en lui-même... Je ne veux pas qu’il m’empêche de vivre et qu’il envenime mes relations avec celles et ceux que j’aime. Je vais mourir, c’est une certitude, mais je préfère mourir heureux plutôt que de mourir stressé.

Karima, 50 ans, atteinte de la Covid-19 en novembre 2020. La perte de l’odorat et du goût m’a énormément déstabilisée, pendant les semaines qui ont suivi ma guérison. J’avais l’impression d’avoir, en permanence, du papier mâché dans la bouche. Je me battais constamment contre ce "quelque chose" qui, même s’il n’était plus dans mon organisme, continuait de me bloquer, de me prendre tout mon corps. J’étais très sportive, mais essoufflée au bout de dix minutes d’efforts – sans compter les sautes d’humeur, les nuits perturbées, les déprimes… Finalement, tous ces chamboulements m’ont amenée à penser que j’ai, désormais, une seconde chance ; je me suis donc fait violence pour reprendre le dessus, pour voir la vie autrement et ne pas me laisser couler. Aujourd’hui, j’apprécie encore plus la vie. Je m’occupe de moi-même, je fais de la méditation – chose que je ne faisais pas avant –, je prends du temps pour déjeuner les midis plutôt que de déjeuner à la va-vite devant mon ordinateur. Je suis plus à l’écoute de mon corps. J’éprouve une certaine gratitude d’avoir passé ce cap. Je me sens aussi plus forte qu’avant : les deux semaines que j’ai passées chez moi à l’isolement m’ont forcées à passer cette épreuve toute seule. J’ai fait du jardinage – c’était l’une des rares choses que je pouvais faire pour passer le temps – et je continue d’en faire régulièrement aujourd’hui. J’apprécie beaucoup plus les fleurs, les plantes, la nature… J’ai, désormais, retrouvé l’odorat et je me rends compte de la chance que j’ai ; de toutes ces petites choses auxquelles je ne prêtais pas attention auparavant.

Saïd, 46 ans, atteint de la Covid-19 en août 2020. La contamination à la Covid-19, et surtout le fait de m’en être sorti, après être passé par un service de réanimation, m’amène désormais à passer plus de temps avec la famille, les amis… Ce sont des choses normales, auxquelles on pense une fois qu’on est débarrassé d’un problème de santé. J’ai aussi beaucoup envie de voyager ; j’ai hâte de pouvoir le faire. Avant, je disais que j’allais passer plus de temps avec ma famille mais je ne le faisais pas. Aujourd’hui, je le dis et je le fais. Je fais aussi plus attention à ma santé. Disons que lorsqu’on a frôlé la mort, on saisit mieux la valeur de la vie. Ma mère a aussi eu la Covid-19 en décembre et elle en est décédée. Ça a été une grande perte, ça nous a tous travaillés psychologiquement… La Covid-19 m’a, certes, affecté psychologiquement, mais la perte de ma mère encore plus. Son décès a amorti, entre guillemets, l’effet psychologique de ma contamination. J’ai bien plus pensé à ma mère qu’à ce qui m’était arrivé.

Nabil*, 64 ans, atteint du Covid-19 en janvier 2021. La Covid-19 a été un souvenir intéressant et constructif. Le fait d’avoir été livré à moi-même a été propice à l’introspection. Il est vrai que la douleur, les courbatures, ont été très intenses, mais avec de la volonté, on les surmonte. A aucun moment je n’ai eu peur de mourir. Pas une seconde. J’avais une détermination absolue. Aujourd’hui, je me rends compte qu’il y a réellement un avant et un après Covid pour moi. Cela me permet, désormais, de relativiser la vie et de regarder le monde différemment. J’en suis sorti en trouvant des excuses à n’importe qui. Je ne me suis plus jamais énervé. J’aime l’humanité, j’essaie de ne voir que les bons côtés des choses et des gens, d’être souriant… Ce que je ne peux pas changer, je l’accepte. Comme beaucoup d’autres personnes, je sais que ça n’arrive pas qu’aux autres. J’ai eu la Covid, j’ai reçu les deux doses du vaccin, et pourtant, je continue à faire très, très, attention. Je ne vais pas au restaurant et je ne m’installe qu’en terrasse dans les cafés. C’est une maladie grave ; il faut que tout le monde fasse attention. J’ai encore beaucoup de courbatures, de fatigues, mais ce n’est pas dramatique… Quand on n’y pense pas, on oublie. Ce qui est important, c’est la nature, l’humanité, la solidarité entre les gens, le service public de santé… Sur ce dernier point, justement : je me suis rendu dans un hôpital public dans un quartier populaire. J’aurais pu aller dans une clinique et je ne l’ai pas fait. Je n’ai rien eu à redire concernant la correction, la professionnalisme et l’accueil du personnel, la propreté des lieux… Je tiens à le répéter. J’ai eu raison de faire confiance au service public de santé.

Amine, 56 ans et atteint de la Covid-19 en septembre. Ça a changé énormément de choses pour moi. Énormément. Le vécu Covid a été une expérience particulièrement pénible et difficile. Étant médecin et donc en contact avec des personnes porteuses du virus, j’avais conscience que j’étais particulièrement exposé. En être conscient, c’est une chose ; l’avoir contractée, c’en est une autre. Ça a été une souffrance aiguë mais qui, toutefois, a fait remonter des choses très positives. Ça a été pour moi un retour vers moi-même, une véritable lutte pour la survie. Cette expérience a changé ma perception des choses dans leur globalité. Lorsqu’on frôle la mort alors même qu’elle fait partie de notre quotidien en tant que médecin, on a l’impression que ça ne concerne que les autres. La notion de la mort, on la met aux oubliettes. Mais lorsqu’on la frôle, lorsqu’on la combat, là, ça change énormément de choses.

(*) Les prénoms ont été modifiés.

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