L'Etat réinjecte 1 milliard de DH dans le système financier
Excédentaire grâce aux dons au Fonds Covid-19, le Trésor a procédé au rachat de bons du Trésor auprès des investisseurs. Plusieurs objectifs : refinancer le marché sans création monétaire, réduire l’endettement de l’Etat, maintenir le marché des taux animé… Explications.
Vendredi 3 avril, la Direction du Trésor et des Finances Extérieures a annoncé qu’elle procédera, ce mardi, à une adjudication « à l’envers » pour racheter des bons du Trésor.
Il s’agit de bons émis entre 2005 et 2019, d’une durée résiduelle comprise entre 3 et 8 mois et dont l’encours initial s’élève à plus de 28 milliards de DH. L’Adjudication a été clôturée à 11h. Le montant du rachat s’élève à 1 milliard de DH.
Normalement, le Trésor sort chaque mardi emprunter de l’argent en émettant des bons. C’est donc inhabituel de le voir restituer de l’argent aux investisseurs, surtout dans ce contexte de finances publiques tendues, où l’Etat s’attend à une baisse des recettes couplée à une hausse des dépenses et s’apprête à sortir sur le marché international pour lever de l’argent.
La dernière opération remonte à décembre 2019
Contacté par Médias24, un haut responsable à la Direction du Trésor précise que ce n’est pas la première fois que l’Etat procède au rachat de bons du Trésor. La dernière fois c’était en décembre 2019 : près de 6 milliards de DH de titres avaient été rachetés.
Le responsable explique qu’en cette fin d’année 2019, le Trésor était excédentaire grâce à l’emprunt international de 1 milliard d’euros effectué un mois plus tôt ainsi qu’aux recettes des mécanismes de financement innovants (cession de 5 CHU à la CMR, notamment).
« Le Trésor devait donc optimiser sa trésorerie en utilisant l’excédent pour racheter des bons et ainsi réduire son endettement. En même temps, les opérations de financement innovants ont asséché les liquidités sur le marché et donc le Trésor devait restituer ces liquidités aux opérateurs », précise notre interlocuteur.
L’Etat se trouve dans la même situation aujourd’hui. Avec les dons au Fonds spécial pour la gestion des effets du Covid-19, le Trésor se retrouve excédentaire. Rien que les dons chiffrés rendus publics portent sur plus de 23 milliards de DH (hors contribution du budget).
Les liquidités bancaires asséchées
Une partie de cet argent servira donc momentanément à réduire l’endettement du Trésor qui, pour rappel, s’apprête à sortir sur le marché financier international pour emprunter en devises compte tenu de la baisse attendue des réserves de change.
En même temps, l’argent des dons constitue un manque à gagner pour le système bancaire qui, en plus, a fait face à des sorties massives de cash ces dernières semaines compte tenu de la panique liée au Coronavirus. « Au lieu que l’argent reste immobilisé chez nous, nous devions réinjecter une partie sur le marché pour que la machine continue à tourner », estime le responsable de la Direction du Trésor.
Pour lui, les banques, qui doivent également faire un effort en termes de report des échéances et d’octroi de nouveaux crédits, peuvent tout à fait se refinancer auprès de Bank Al-Maghrib, disposée à injecter toutes les liquidités nécessaires sur le marché. Mais cela constituerait une création monétaire.
« Il faut d’abord épuiser toutes les sources de liquidités disponibles avant de recourir à la création monétaire qui peut être source d’inflation. C’est pour cela que le Trésor, Bank Al Maghrib et les opérateurs du marché se concertent régulièrement », précise-t-il.
Le Trésor ne peut déserter le marché
Autre objectif, en utilisant ses excédents pour racheter des titres, le Trésor reviendra rapidement sur le marché intérieur de la dette pour se financer et permettra aux investisseurs d'utiliser cet argent pour souscrire de nouveaux aux bons du Trésor. « C’est une nécessité. Le Trésor ne peut se permettre de déserter le marché pendant des semaines », affirme la Direction du Trésor.
En effet, il faut toujours de nouvelles cotations des différentes maturités de bons du Trésor pour permettre au marché financier de fonctionner. Les gestionnaires d’OPCVM qui ont tout le temps des souscriptions et des rachats, les investisseurs institutionnels qui doivent placer leurs réserves…, tout l’écosystème a besoin d’une présence régulière du Trésor sur le marché et d’une courbe des taux actualisée pour qu’il continue à fonctionner normalement.
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