Obligation de tenir une comptabilité électronique: tous les détails de la nouvelle mesure fiscale

Au titre des ‘’nouveautés’’ de la LF 2018, l’article 8 instaure l’obligation de tenir une comptabilité électronique aussi bien pour les sociétés que pour les personnes physiques justifiant d’un revenu professionnel – principalement les professions libérales. Quel est le périmètre d’application de cette mesure? Qui sont les contribuables concernés? Y a-t-il une sanction pour les contrevenants? Explications.

Obligation de tenir une comptabilité électronique: tous les détails de la nouvelle mesure fiscale

Le 5 février 2018 à 18h08

Modifié 5 février 2018 à 18h08

Au titre des ‘’nouveautés’’ de la LF 2018, l’article 8 instaure l’obligation de tenir une comptabilité électronique aussi bien pour les sociétés que pour les personnes physiques justifiant d’un revenu professionnel – principalement les professions libérales. Quel est le périmètre d’application de cette mesure? Qui sont les contribuables concernés? Y a-t-il une sanction pour les contrevenants? Explications.

>>Qui est concerné par cette mesure?

L’ensemble des contribuables – personnes physiques ou morales, relevant de l’IS ou de l’IR au titre de leurs revenus professionnels, ainsi que ceux assujettis à la TVA.

>>Quelle est la date d’entrée en vigueur de cette mesure?

Si elle a été instaurée dans le cadre de la LF 2018, l’entrée en vigueur de l’obligation de tenir une comptabilité électronique reste tributaire de la publication d’un décret règlementaire.

Ce qui nécessite au préalable une série de concertations entre la DGI et les professionnels: «Nous allons mener des réunions avec les différentes parties prenantes: experts comptables, comptables agréés, CGEM,… afin de fixer les critères d’application de manière collégiale et garantir ainsi l’adhésion des professionnels, qui connaissent mieux que nous les limites de l’application de cette mesure» explique Khalid Zazou, directeur de la Législation, des Etudes, et de la Coopération internationale au sein de la DGI.

Ainsi, ces réunions débuteront vers la fin février, pour une probable publication du décret d’application en juin 2018.

>>Facturation

En vertu des dispositions de l’article 145-III du Code général des impôts, les contribuables relevant de l'IS ou de l’IR au titre de leurs revenus professionnels, ainsi que ceux assujettis à la TVA, sont tenus de délivrer à leurs clients ou acheteurs des factures ou mémoires pré-numérotés et édités par un système informatique selon une série continue.

La mesure concerne essentiellement les contribuables exerçant dans certains secteurs d’activité qui seront également définis par voie règlementaire. De manière progressive, ils auront ainsi l’obligation de se doter d’un système informatique de facturation.

>>Tenue d’une comptabilité électronique

L’obligation de tenir une comptabilité sous format électronique entre en vigueur à compter de la date de publication du décret règlementaire. Précisons que nous abordons ici l’obligation de tenir l’intégralité des opérations comptables sur un progiciel, et non la simple saisie informatique des opérations en fin d’exercice, qui entre plus dans le cadre de la présentation et de la conservation des documents comptables sur un support informatique.

«L’obligation de tenir intégralement sa comptabilité sous format électronique va être imposée de manière progressive, à des entreprises d’une certaine taille, avec un certain niveau d’organisation, des prérequis techniques nécessaires. Les réunions avec les professionnels permettront justement de définir ces critères: nature d’activité, niveau de chiffre d’affaires,…» précise Khalid Zazou de la DGI.

>>Présentation et conservation des documents comptables sous format électronique

Cette obligation est applicable essentiellement en cas de contrôle fiscal. Elle concerne les contribuables qui tenaient déjà leur comptabilité sous format électronique avant le 1er janvier 2018, de même que les contribuables assujettis à cette mesure en 2018 – tels que définis par un décret règlementaire, dont la date de publication marque l’entrée en vigueur de l’obligation.

Les documents comptables à présenter sur support électronique sont ceux nécessaires au contrôle fiscal - visés à l'article 211 du CGI, notamment les livres sur lesquels les opérations ont été enregistrées, le grand livre, le livre d'inventaire, les inventaires détaillés non recopiés intégralement sur ce livre, le livre-journal et les fiches des clients ainsi que des fournisseurs, aux côtés de tout autre document prévu par la législation ou la réglementation en vigueur. Le fichier électronique des écritures comptables sera défini par voie réglementaire conformément aux dispositions de l'article 145-I du CGI.

Soulignons que, par support électronique, la DGI entend tout dispositif de stockage de données numérisées: CD, clé USB,…

>>Sanctions

Une amende de cinquante mille (50.000) dirhams est applicable aux contribuables qui ne conservent pas les documents comptables, ou leur copie, sur support informatique et à défaut sur support papier - conformément aux dispositions de l’article 211 du CGI.

A noter qu’en cas de contrôle fiscal portant sur plusieurs exercices, l’amende sera dans ce cas de 50.000 DH par exercice.

>>Avantages

La comptabilité électronique permet notamment à l’entrepreneur un suivi rigoureux des indicateurs de gestion online, un monitoring affiné de son activité ainsi qu’un contrôle de gestion plus fluide…

Pour l’Etat, l’adoption de cette mesure aboutira à un meilleur contrôle – voire à l’amélioration des recettes fiscales. «A condition de diminuer la pression fiscale» souligne El Mehdi Fakir, expert-comptable, qui craint de voir des contribuables basculer dans l’informel des suites de cette mesure.

>>L’attrait de l’informel?

Pour l’expert-comptable, le risque est réel. «Les professionnels le savent, cela s’est déjà produit lors de l’instauration de la télé-déclaration et du télépaiement. Plusieurs sociétés ont préféré mettre la clé sous la porte, surtout celles pour qui l’informel relève carrément du business model».

S’il reconnaît le bien-fondé et l’intérêt de la comptabilité électronique, Fakir avertit cependant quant aux éventuelles répercussions socioéconomiques. «Ma crainte est que cette transparence ne soit pas du goût de tout le monde. Comme cela a été le cas par le passé, des sociétés et des personnes physiques préfèreront mettre la clé sous la porte et investir dans la pierre, ou investir en bourse… L’impact sera réel sur notre économie, surtout en termes de destruction d’emplois».

Une appréhension que ne partage pas le directeur de la Législation au sein de la DGI, Khalid Zazou: «Au sein de la DGI, nous avons modernisé nos moyens et pouvons agir à différents niveaux. Ce n’est pas en passant à l’informel qu’un contribuable échappera au contrôle».

>>Comment faire réussir cette mesure?

El Mehdi Fakir retient deux priorités: une application graduelle de la comptabilité électronique, assortie d’un sérieux effort de communication de la part des autorités compétentes.
«Il faut y aller par étapes afin que la comptabilité électronique n’ait pas d’effets contre-productifs. De par ma profession je peux vous certifier que cette mesure rend les gens inquiets. Ils ne sont pas habitués à ce degré de transparence, alors qu’ils sont plutôt familiers avec des pratiques favorisant l’informel et la facturation ‘’au noir’’. D’où aussi l’importance de sensibiliser les contribuables en optant pour une approche pédagogique, afin d’instaurer un mindset favorable à l’adoption généralisée de la comptabilité électronique».

Du côté de la DGI, notre interlocuteur confirme le caractère progressif du déploiement de cette mesure, tout en soulignant qu’elle s’appliquera à une catégorie bien précise de contribuables: «Aujourd’hui, beaucoup d’entreprises – surtout des PME, présentent leur comptabilité papier à un fiduciaire, afin de procéder à sa saisie sur un progiciel de comptabilité. A nos yeux, la viabilité des PME prime sur tout le reste, et nous n’allons certainement pas leur imposer une charge supplémentaire,» tempère Khalid Zazou.

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