Bataille juridique et des chiffres sur l’acier importé

Audience publique dans l’affaire de la protection du sidérurgiste Maghreb Steel, producteur marocain d’acier. Il s’agissait pour les uns, de prouver qu’il y a eu dumping. Et pour ces derniers, de prouver qu’il n’en est rien.

Bataille juridique et des chiffres sur l’acier importé

Le 4 février 2014 à 20h15

Modifié 4 février 2014 à 20h15

Audience publique dans l’affaire de la protection du sidérurgiste Maghreb Steel, producteur marocain d’acier. Il s’agissait pour les uns, de prouver qu’il y a eu dumping. Et pour ces derniers, de prouver qu’il n’en est rien.

Le problème est peut-être mal posé. Au cours de l’audience publique consacrée à la question, au ministère du commerce extérieur, il s’agissait de savoir si oui ou non, il y a dumping de la part de producteurs étrangers. Alors que la vraie question est de savoir où se situe l’intérêt de l’industrie marocaine. S’agit-il pour elle de pouvoir importer librement ou bien d’importer en payant des droits et donc plus cher que ses concurrents ?

La question est-elle de savoir si le Maroc a le droit de protéger Maghreb Steel? ou bien s’il doit le faire?

Car n’oublions pas une chose : protéger Maghreb Steel n’est pas protéger l’industrie nationale. C’est un peu le contraire. Les intérêts sont contradictoires. L’acier est une matière première que l’industriel a intérêt à acheter le moins cher possible.

L’audience du ministère du Commerce extérieur

La bataille juridique s’annonce mouvementée entre Maghreb Steel et les géants mondiaux de la sidérurgie. Le débat est marqué par une opacité des chiffres. Maghreb Steel invoque une disposition de l’OMC pour prouver les dommages causés, à savoir «le retard important dans la création d’une branche de production nationale ». Encore faut-il prouver le dumping.

La loi antidumping est claire. Pour prouver le dommage, il faut d’abord prouver qu’il y a effectivement eu dumping. C'est la position que le Marocain Maghreb Steel a tenté de défendre lors d'une audience publique organisée le 4 février à Rabat.

Le calcul du taux de marge provisoire de dumping (applicable durant les 6 prochains mois) fait ressortir un taux de 0% pour le Turc Erdemir, et un taux de 1,97% pour son confrère Colakoglu (ramené à 0% selon des dispositions de l’OMC). Tout autre exportateur (turc compris) se verra appliquer un taux à l’entrée de 29,12%, au même titre que les exportateurs européens.

Ce traitement “de faveur“ accordé aux deux sociétés turques est dû au fait qu’elles se sont pliées au contrôle du ministère de l’Industrie, même si Colakoglu ne dispose pas, pour le moment, des détails de son chiffre d’affaires. En effet, Erdemir a soumis la communication non-confidentielle et les données confidentielles au contrôle institutionnel. Pourtant, Maghreb Steel y voit une manœuvre pour contourner la législation. «Seules 3 factures ont été présentées lors de la phase d’enquête. Il y en a vraisemblablement d’autres qui n’ont pas été montrées» déclare la communication l’industriel marocain.

La question de la confidentialité est au centre des débats. Où s’arrête la preuve et où commence le secret industriel? A ce propos, Erdemir s’engage à mettre à disposition des autorités l’ensemble des éléments, publics ou confidentiels, pour prouver la véracité de ses chiffres.

Toutefois, si le dumping est attesté, le dommage n’est pas automatique prouvé. Là encore, Maghreb Steel a du pain sur la planche.

En effet, Maghreb Steel invoque une disposition l’article VI du GATT de 1994. Selon les termes de ce texte, un droit antidumping spécifique est appliqué à l’exportateur dans le cas où le produit exporté cause ou menace d’entraîner la fin d’une branche de production nationale, ou en retarde la création. Le deuxième élément est retenu dans l’argumentaire de l’industriel marocain. En effet, Maghreb Steel met en avant le retard entraîné par l’importation de produits turcs et européens, de la création d’une branche pour la fabrication de tôles en acier laminées marocaines.

Les industriels turcs et européens ne se laissent pas faire. Ils pointent du doigt l’opacité des chiffres présentés par Maghreb Steel, et les contradictions sont selon eux flagrantes entre son business plan et les raisons invoquées. Le porte-parole d’Arcelor Mittal fait d’ailleurs constater que Maghreb Steel disposait d’une activité «tôle d’acier laminée» en 2010 déjà, et que l’industrie de la sidérurgie est établie depuis 2001 au Maroc. «Maghreb Steel disposait, effectivement, d’une activité d’aciérie en 2010,  mais la fabrication était destinée à la livraison interne» répond le concerné.

Difficile donc de parler du ralentissement d’une branche d’activité nouvelle, d’autant plus que le secteur de la sidérurgie dans sa globalité connaît un affaiblissement au niveau mondial (27% de la demande en Europe en 2013), et que la capacité de production totale de Maghreb Steel (1,5 millions de tonnes) tend à prouver que le Marocain était industriellement préparé à couvrir plusieurs fois la totalité de la demande nationale. A ce propos, le producteur national «couvre pas moins de 68% des parts de marché au Maroc» accuse une porte-parole du groupe Arcelor. Chiffre non démenti par Maghreb Steel !

Autre point de discorde, il s’agit du rapport du cabinet Mc Lellan qui a évalué les dommages pour la période 2009-2012. Mais la conjoncture a depuis radicalement changé, et le marché et les postulats sont actuellement totalement différents.

Pour rappel, d’après la grille des exportateurs visés, les turques Colakoglu et Erdemir sont logés à la meilleure enseigne. En effet, tous deux se voient appliquer un droit antidumping de 0%, tandis que le taux s’élève à 29,12% lorsqu’il s’agit de l’importation de tôles en acier laminées en provenance d’Europe et d’autres sociétés turques.

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