L'Egypte au bord de la guerre civile

Etat d'urgence, couvre-feu et violents affrontements dans les grandes villes égyptiennes. La situation tourne au tragique avec la dispersion des manifestations pro-Morsi ce mercredi matin, qui a fait plusieurs dizaines ou plusiers centaines de morts selon les sources.

L'Egypte au bord de la guerre civile

Le 14 août 2013 à 15h56

Modifié le 27 avril 2021 à 22h21

Etat d'urgence, couvre-feu et violents affrontements dans les grandes villes égyptiennes. La situation tourne au tragique avec la dispersion des manifestations pro-Morsi ce mercredi matin, qui a fait plusieurs dizaines ou plusiers centaines de morts selon les sources.

L'état d'urgencea été décrété mercredi en Egypte après que la dispersion par les forces de l'ordre de rassemblements de partisans du président islamiste déchu Mohamed Morsi a viré au bain de sang, avec plus de 120 morts.

Le président provisoire a également décrété le couvre-feu au Caire et dans plusieurs villes et appelé l’armée à intervenir pour rétablir l’ordre. De son côté, le leader politique Mohamed el-Baradei, ministre et vice-président, a annoncé sa démission.

L’assaut de ce matin, qui a reçu une salve de condamnations internationales, a provoqué des violences à travers toute l'Egypte, les Frères musulmans, dont est issu M. Morsi, ayant appelé à manifester pour "mettre fin au massacre".

Dans le centre, où vit une importante minorité copte, trois églises ont été attaquées, les militants accusant les pro-Morsi de mener "une guerre de représailles" contre les chrétiens.

 

Un assaut par surprise

Au Caire, sur les places Rabaa al-Adawiya et Nahdha, où campaient depuis plus d'un mois des milliers d'islamistes venus avec femmes et enfants, les bulldozers des forces de l'ordre qui avaient promis une opération "graduelle" et des "sommations", ont pris les manifestants par surprise à l'aube.

Dans l'après-midi, un journaliste de l'AFP a compté 124 cadavres --dont plusieurs manifestement tués par balles-- dans la morgue de fortune de l'un des deux rassemblements pro-Morsi, celui de la place Rabaa al-Adawiya au Caire. Et ce nombre pourrait augmenter, car aucun bilan n'était disponible dans l'immédiat après la dispersion de la place Nahda, que l'Intérieur dit désormais contrôler "totalement".

Des correspondants de l'AFP y ont vu quatre cadavres, certains calcinés. Le bilan officiel publié l'après midi par le ministère de l'Intérieur, est de 149 morts.

Au cours de la dispersion des manifestants qui avaient promis de rester dans leur village de tentes jusqu'au retour au pouvoir du premier président démocratiquement élu, un caméraman de la chaîne britannique Sky News a été tué par balle.

543 personnes arrêtées

Les Frères musulmans ont de leur côté annoncé que la fille de 17 ans d'un de leurs principaux leaders, Mohammed al-Beltagui, avait également été tuée par balle.

Au total, les Frères parlent de 2.200 morts et plus de 10.000 blessés, tandis que les autorités disent avoir recensé 95 décès à travers le pays, dont au moins sept membres des forces de sécurité au Caire, et affirment que les manifestants ont ouvert le feu sur la police.

Un responsable de la sécurité a affirmé à l'AFP que 543 personnes avaient été arrêtées.

L'imam d'Al-Azhar, plus haute autorité de l'islam sunnite, s'est désolidarisé de l'opération en expliquant à la télévision n'avoir pas eu connaissance des méthodes que les forces de l'ordre comptaient employer, après avoir pourtant apporté sa caution lors du coup de force des militaires contre M. Morsi le 3 juillet.

Outre l'état d'urgence décrété dans le pays à partir de 14H00 GMT, le gouvernement a annoncé que le trafic ferroviaire en direction et depuis Le Caire était interrompu pour prévenir de nouveaux rassemblements.

En représailles à la dispersion, des islamistes bloquaient des axes du Caire en incendiant des pneus pour tenter de paralyser le pays. Des heurts avaient lieu dans différents quartiers du Caire et ont fait plusieurs morts dans d'autres villes du pays.

A Alexandrie, la deuxième ville du pays dans le nord, des échanges de tirs nourris à l'arme automatique avaient lieu, a constaté un journaliste de l'AFP.

Dans les provinces d'el-Menia et de Sohag (centre), des pro-Morsi ont incendié des églises de la communauté copte, dont le patriarche avait lui aussi soutenu la décision de l'armée de destituer M. Morsi, toujours retenu au secret.

Cesser "le massacre"

Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a "condamné dans les termes les plus fermes les violences". Ankara, qui s'était opposé à la destitution de M. Morsi, a appelé la communauté internationale à faire cesser le "massacre", un terme également utilisé par l'Iran. Londres a "condamné l'utilisation de la force" et la Suède a fait porter la "principale responsabilité" des violences aux autorités. Le Qatar, principal soutien des Frères musulmans, a dénoncé "la méthode utilisée contre des manifestants pacifiques", tandis que Paris et Berlin lançaient des appels au calme dans le pays où les violences entre pro et anti-Morsi et entre pro-Morsi et forces de l'ordre avaient auparavant fait plus de 250 morts depuis fin juin, essentiellement des manifestants islamistes.

Le gouvernement et la presse quasi-unanime accusaient les Frères musulmans d'être des "terroristes" ayant stocké des armes automatiques sur les deux places et se servant des femmes et des enfants comme "boucliers humains".

Les nouvelles autorités, s'appuyant sur une grande partie de la population qui reprochait à M. Morsi d'avoir cherché à accaparer le pouvoir sans rien faire pour l'économie en crise, entendent lancer une période de transition devant mener à des élections début 2014.

 

Au Caire, la bataille sanglante contre les irréductibles pro-Morsi


Des trainées de sang conduisent à la morgue improvisée sous une tente près du QG des manifestants pro-Morsi, place Rabaa al-Adawiya.

Là, gisent les cadavres de 43 hommes dont certains tués par balles, deux heures à peine après le début de l'assaut de la police et de l'armée au Caire.

Tout autour de cet "hôpital de campagne" de fortune, les grenades lacrymogènes pleuvent sans discontinuer et les rafales assourdissantes d'armes automatiques le disputent aux chants islamistes crachés par les haut-parleurs de la tribune voisine.

C'est de là que les imams et les leaders de l'Alliance contre le coup d'Etat haranguaient jusque tard dans la nuit des milliers de manifestants réclamant le retour au pouvoir de Mohamed Morsi, le président destitué et arrêté par l'armée le 3 juillet.

A côté de 35 cadavres maculés de sang -les autres se trouvant juste à l'extérieur pendant que l'on monte une deuxième morgue de toile-, les médecins des Frères musulmans, l'influente confrérie de M. Morsi, se concentrent sur les blessés qu'ils peuvent encore sauver après un tri macabre, rapporte un journaliste de l'AFP.

Mis à l'écart, un homme pousse ses derniers soupirs, le crâne transpercé par une balle.

A une centaine de mètres de là, sur la barricade de sacs de sable érigée depuis plus d'un mois sur la grande avenue menant à la place Rabaa, des hommes casqués font face à la police et à l'armée qui progressent au milieu d'un ballet d'ambulances.

Pierres, lances-pierres, cocktails Molotov, tout est bon pour essayer de retarder l'assaut final et protéger le coeur de la contestation: la mosquée Rabaa al-Adawiya, servant de QG et de centre de presse aux quelques responsables des Frères musulmans qui n'avaient pas encore été interpellés mais sont sous le coup d'un mandat d'arrêt.

"De toute façon, on va mourir !"

Quelques hommes font également face, armés de fusil d'assaut, accréditant partiellement la thèse du gouvernement mis en place par l'armée, qui accusait les "terroristes" pro-Morsi de stocker des armes places Rabaa al-Adawiya et Nahda.

"De toute façon, on va mourir !", lance l'un d'eux au milieu des tirs de snipers les visant depuis les barres d'immeubles résidentiels qui ceignent la place Rabaa.

Depuis un mois, des milliers de personnes campaient, certains avec femmes et enfants, sur les places Rabaa al-Adawiya et Nahda.

(Avec AFP. Photos et infographie: AFP)

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